Lectures du jour :

Première lecture : Gn 2,7-9.3,1-7 ;
Psaume 50,3-6.12-14.17 ;
Deuxième lecture : Rm 5,12-19 ; 
Évangile : Mt 4,1-11.

Homélie :

« Ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit se nourrir, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »
Écoutons bien cette parole de Jésus… qu’est-ce qu’elle veut dire ?
Pour moi, elle a quelque chose de fascinant : littéralement, cela voudrait dire que, non seulement nous pourrions, mais nous devrions nous nourrir de la Parole de Dieu. Comment cela est-il possible ?
J’aimerais, avec vous, essayer de mieux la comprendre, cette parole, d’abord en regardant d’où Jésus la tire, ensuite en regardant comment cela s’est manifesté dans l’histoire de l’humanité, et enfin en arrivant à nous, maintenant, dans cette célébration du premier dimanche de Carême.

1. D’où Jésus sort-il cette citation ?
Elle vient du Deutéronome, et renvoie directement aux quarante ans au désert que le peuple de Dieu, guidé par Moïse, a vécus après la sortie d’Égypte. Face à la difficulté de la loi, face à la difficulté de la conquête de leur liberté, le peuple d’Israël a reculé et préféré l’esclavage en Égypte dont Dieu voulait le délivrer. Ils restent quarante ans au désert. Cependant, Dieu ne les abandonne pas : non seulement il ne reprend pas sa Parole donnée, son Alliance fondée sur le Décalogue, mais il nourrit directement, lui-même, son peuple grâce à la manne qu’il donne par sa Parole créatrice de nourriture.

2. Cette histoire se répète tout au long de l’histoire de l’humanité : Dieu parle à Adam & Ève ; ils ne l’écoutent pas et désobéissent, mais Dieu les nourrit encore et leur promet un sauveur. Dieu parle, par Moïse, à son peuple ; il ne l’écoute pas et désobéit, mais Dieu lui donne à manger et à boire. Dieu parle par ses prophètes à son peuple ; il ne l’écoute pas et désobéit, mais Dieu lui promet encore un sauveur.
Ce qui est frappant, c’est de voir que, depuis Adam & Ève, à chaque fois que Dieu parle aux hommes, ils refusent de l’écouter, désobéissent et rompent ainsi l’alliance que Dieu a conclue avec eux.
Ce qui est encore plus frappant, c’est de voir que, depuis Adam & Ève, à chaque fois que les hommes désobéissent et rompent son alliance, Dieu promet une nouvelle alliance et continue à leur donner sa Parole et sa nourriture…
Et voici le Verbe de Dieu, la Parole de Dieu, qui se fait vrai homme, et qui va au désert pour écouter son Père, pendant quarante jours et quarante nuits, sans manger autre chose que ce que l’on trouve au désert : la Parole de Dieu. Face à la tentation à laquelle Adam & Ève ont succombé, à laquelle le peuple guidé par Moïse a succombé, à laquelle tous les hommes ont succombé, Jésus se tourne à chaque fois vers son Père, l’écoute, et lui obéit. Enfin ! Enfin un homme a écouté Dieu, s’est nourri réellement de ce qui sortait de sa bouche, et lui a obéi !

3. Comment nous, aujourd’hui, en ce premier dimanche de Carême, pouvons-nous à notre tour nous nourrir de la Parole de Dieu ?
En premier lieu, en nous reconnaissant, comme tous les hommes depuis Adam & Ève, désobéissants parce que nous préférons l’esclavage de ce monde à la liberté souveraine des enfants de Dieu. Et en étant, par conséquent, infiniment reconnaissants que Dieu nous donne toujours sa Parole à entendre, cette Parole de vérité, cette Loi de liberté que nous avons chantée dans l’acclamation de l’Évangile.
Et, en second lieu, en nous mettant à la suite de Jésus, le nouvel Adam, qui s’associe étroitement Marie, la nouvelle Ève, dans l’écoute de sa Parole de vérité, dans l’obéissance fidèle à sa Loi de liberté. Mais plus encore, en ouvrant notre cœur à cette folie de l’amour de Jésus qui nous donne son corps à manger dans l’Eucharistie. La Parole de Dieu n’est plus seulement nourrissante de manière symbolique, ou parce qu’elle crée la manne au désert pour que nous nous en nourrissions : elle se fait littéralement, réellement nourriture pour que nous la mangions et que nous en vivions. De même que la nourriture que nous mangeons devient notre propre corps, et qu’une bonne nourriture rend notre corps solide et apte à agir bien, de même Jésus se donne en nourriture à nous pour que nous devenions son propre Corps, et que nous soyons solides et aptes à agir selon sa Loi de liberté.

Chers amis, durant ce Carême, jeûnons donc un peu de tout ce qui n’est pas la Parole de Dieu pour nous recentrer sur la seule nourriture qui est vraiment source de vie, et de vie bonne : la Parole de Dieu dans les lectures que nous venons d’entendre et dans l’Eucharistie que nous allons manger.