Lectures du jour :

Première lecture : Ne 8,1-6.8-10 ;
Psaume 18,8-10.15 ;
Deuxième lecture : 1 Co 12,12-30 ; 
Évangile : Lc 1,1-4;4,14-21.

PRÉLIMINAIRE À LIRE ABSOLUMENT SOUS PEINE D'INCOMPRÉHENSION DU PROPOS QUI SUIT :

Ceci est une homélie, c'est-à-dire une prédication faite par un prêtre (moi) dans le cadre de la célébration de la messe, assemblée liturgique rassemblée au nom du Seigneur. Autrement dit, un rassemblement de catholiques, et pas un meeting politique, pas une réunion d'un club de philosophie, pas non plus d'une discussion de coin de zinc dans un bar.
L'intention du prêtre en question (moi) est d'exhorter les fidèles à reconnaître l’Église pour ce qu'elle est, et de (re)découvrir ce qu'elle dit, pourquoi elle le dit, à la lumière d'un cas concret.
Le sujet en est donc essentiellement celui qui est donné par le titre : il s'agit de parler de la mission de l’Église avant tout, même si le cas concret est délicat et provoque donc mon homélie sur le sujet.

Aussi je passe les commentaires en modération : ils n'apparaîtront qu'avec mon accord ainsi explicite. Je me réserve le droit de ne pas publier tous ceux qui essaieront de me convaincre (et mes lecteurs avec moi) du bien-fondé du mariage "civil" pour les couples de deux personnes de même sexe, ou de toute autre position politique ou philosophique. C'est une position théologique que je soutiens et que j'enseigne au nom même de l’Église et du Christ qui m'envoient, en communion avec le collège des évêques rassemblés autour du Pape.
En revanche, je suis prêt à discuter courtoisement et calmement sur la manière de recevoir cette vérité de foi catholique.

Ceci n'est pas de la censure, c'est une ligne éditoriale dictée par la nécessité, notamment le temps et l'énergie dont je dispose.

Merci :)

Homélie :

Vous l’avez certainement remarqué : à chaque messe, qu’elle soit en semaine ou le dimanche, on prend le temps d’écouter, parfois longuement comme aujourd’hui, la Parole de Dieu. Cela nous paraît même sans doute évident.
Et pourtant, il serait bon de nous demander pourquoi il est si important de l’écouter à chaque fois. En quoi cela est-il si important d’écouter aujourd’hui des paroles qui ont été prononcées et mises par écrit il y a des siècles et des siècles ?
Pour tenter de répondre à cette question, j’aimerais, à partir notamment de la belle première lecture que nous avons écoutée tout-à-l’heure, tenter de répondre à deux questions : 1. Qu’est-ce que la Parole de Dieu ? 2. Qui la transmet ? et 3. Comment devons-nous la recevoir ? avant d’appliquer ce que nous aurons compris à une question très actuelle.

1. Qu’est-ce que la Parole de Dieu ?
Dans notre première lecture d’aujourd’hui, nous voyons Esdras proclamer la « Loi de Moïse, que le Seigneur avait donnée à Israël », devant tout le peuple rassemblé dans Jérusalem. Cette proclamation de la Loi donnée par Dieu consacre la renaissance du Peuple d’Israël après l’exil, le retour d’exil et la reconstruction de Jérusalem et du Temple.
Cette loi est Parole de Dieu, car la Parole de Dieu est ce qui est donné un jour par Dieu, pour toujours, au Peuple de Dieu. Je crois que nous pouvons tous être d’accord sur cette définition.
L’on pourrait croire alors qu’il s’agit simplement de l’appliquer à la lettre pour agir toujours bien. Et pourtant…

2. Qui transmet la Parole de Dieu ?
Chose étonnante, voilà que nous lisons ceci : « Esdras lisait un passage dans le livre de la Loi de Dieu, puis les lévites traduisaient, donnaient le sens, et l’on pouvait comprendre ». Qu’est-ce que cela veut dire ?
Tout d’abord, il faut savoir que plus personne ne parle hébreu en Israël : il faut donc tout traduire en araméen. On peut penser que cela pourrait suffire, mais non : les lévites doivent non seulement traduire, mais ils doivent donner le sens pour que l’on comprenne. Et une fois que l’on a compris, on peut appliquer la Loi, et cette fête est là pour nous montrer qu’agir selon elle rend profondément joyeux parce que Dieu indique par cette Loi ce qui est bon pour l’homme.
Pourquoi raconté-je tout cela ?
Aux jours d’Esdras, Dieu avait confié aux lévites la mission très particulière et ardue, mais indispensable, d’écouter la Parole de Dieu et de l’interpréter. De l’interpréter selon la volonté même de Dieu qui l’avait donnée à un moment pour toujours, mais évidemment selon la langue et les repères du moment. Quelques siècles plus tard, il faut donc ces lévites, choisis par Dieu, pour en donner le sens et l’application pour cette époque-là.
De la même manière, Jésus confiera à ses apôtres, Pierre en tête, d’une part sa Parole à annoncer à tous pour que tous la reçoivent, et d’autre part la mission de la transmettre, de la traduire et d’en donner le sens pour les générations futures, qui n’auraient plus le même langage ni la même culture. Et il a donné son Esprit à toute l’Église, à ceux qui devaient enseigner comme à ceux qui devaient recevoir cet enseignement, pour que tous ensemble constituent ce corps unique du Christ Jésus. Relisez le texte de saint Paul, il ne dit pas autre chose.
Jésus lui-même en son temps reprend le texte qu’il a lui-même donné à Isaïe plusieurs siècles auparavant, et en donne la signification pour ce jour où lui, le Christ, le Messie, vient l’accomplir.
C’est une constante dans la révélation de la Parole de Dieu et dans sa transmission et son enseignement : elle est dite un jour pour toujours, et il faudra donc nécessairement l’interpréter pour que, à partir de ce jour, elle devienne compréhensible chaque jour et qu’ainsi on puisse lui répondre en la comprenant et en y adhérant librement.
Cette mission, depuis la Résurrection du Christ et la Pentecôte, est confiée à l’Église, et, dans l’Église, aux Apôtres et à leurs successeurs réunis autour du successeur de Pierre… et à personne d’autre.

3. Dans quelle attitude devons-nous recevoir la Parole de Dieu ?
Il y a autre chose qui est étonnant : « Esdras ouvrit le livre ; tout le peuple le voyait, car il dominait l'assemblée. Quand il ouvrit le livre, tout le monde se mit debout. Alors Esdras bénit le Seigneur, le Dieu très grand, et tout le peuple, levant les mains, répondit : "Amen ! Amen !" Puis ils s'inclinèrent et se prosternèrent devant le Seigneur ».
Que veut dire ce « Amen ! Amen ! » du peuple de Dieu ? Cela veut dire qu’il adhère à cette parole donnée par Dieu et proclamée par Esdras, qu’il la reçoit comme Parole de Dieu. Mais ce qui est profondément étonnant, c’est que tous proclament « Amen ! Amen ! » avant même qu’Esdras ait ouvert la bouche.
Cela veut dire que, quoi qu’il sortira de la bouche d’Esdras lisant le livre de la Parole de Dieu, ils le reçoivent a priori, par avance, comme la Parole de Dieu qu’il devront appliquer selon le sens donné par les lévites.
C’est un enseignement capital pour nous aujourd’hui : de même qu’Israël s’engage à appliquer la Parole de Dieu proclamée, traduite, expliquée pour qu’ils puissent la comprendre avant même qu’ils l’aient entendue, de même nous aussi, fidèles du Christ, réunis dans l’Église catholique, nous devons accepter de recevoir a priori cette Parole de Dieu pour nous, dans la foi en l’Église qui a reçu la mission de la transmettre, de l’interpréter et de l’enseigner sous l’assistance constante du Saint-Esprit, comme Jésus nous l’a promis.
C’est ce que l’on appelle "l’obéissance de la foi", et le concile Vatican II le rappelle avec force : « À Dieu qui révèle est due "l’obéissance de la foi", par laquelle l’homme s’en remet tout entier et librement à Dieu dans "un complet hommage d’intelligence et de volonté à Dieu qui révèle" et dans un assentiment volontaire à la révélation qu’il fait. » (Dei Verbum 5).

Application à la question, aujourd’hui, du mariage.
Permettez-moi de passer outre les questions de droit civil, de philosophie ou autre à propos du mariage, je ne suis pas compétent.
Permettez-moi simplement de rappeler une chose : l’Église, à la suite du peuple d’Israël, a reconnu le mariage comme une réalité naturelle. Cela veut dire qu’elle est inscrite par Dieu dans la nature même de l’homme-anthropos (être humain) inséparablement mais distinctement homme et femme. Cette réalité, il ne dépend pas de l’Église ni de qui que ce soit de la changer, puisqu’elle est donnée par Dieu à l’origine et rappelée sans ambiguïté possible par le Christ Jésus lui-même. Jésus qui l’a lui-même élevée au rang de sacrement, c’est-à-dire signe efficace de l’amour de Dieu pour l’humanité dès l’origine, et signe efficace de l’amour du Christ pour son Église dans l’accomplissement du salut par les Noces de l’Agneau sur la croix !
Le mariage-sacrement et le mariage naturel ne sont pas deux réalités distinctes : c’est la même réalité avant et après le Christ. Le mariage ne change pas, il est élevé à une dignité plus haute.

Ainsi, je dois le dire et je pleure de devoir le dire, il n’est pas possible aujourd’hui à un catholique – fût-il prêtre ! – de dire, a fortiori au nom de l’Église, que le mariage peut être ouvert aux couples de personnes de même sexe. Je le répète : ce n’est pas possible ! Et ce, précisément parce que le mariage naturel est donné par Dieu à l’humanité, et que le même mariage est confié à l’Église par le Christ.
L’Église a toujours reconnu que le mariage était une réalité de loi divine, et qu’elle n’avait pas pouvoir d’en changer la nature. Et elle ne changera pas, parce qu’elle n’en a ni le droit ni le pouvoir.

Aussi, j’invite chacun et chacune d’entre vous, qui vous reconnaissez catholiques et qui souhaitez vivre en communion avec le Christ et l’Église (autrement vous ne seriez pas ici à la messe), à recevoir la Parole de Dieu et l’interprétation qu’en donne, depuis des siècles, l’Église, en vraie obéissance : obéissance de l’Église au Christ, obéissance des catholiques à l’Église et au Christ.
L’obéissance n’exclut jamais la réflexion et la liberté personnelles : on peut se poser des questions. Mais, permettez-moi de vous le dire : contre le Christ et l’Église, il n’y a point de vérité. Je vous en supplie au nom de Dieu : réfléchissez, débattez, posez-vous des questions, ne demeurez pas en repos sur ces questions graves, mais ne vous laissez pas séparer de l’Église et du Christ à cause de ces questions.
Je vous demande pardon si, parce que j’avais peu de temps, parce que je ne suis pas assez délicat, je vous ai blessés d’une manière ou d’une autre durant cette homélie. Que le Seigneur me pardonne et agisse au cœur de chacun d’entre nous pour que nous soyons tous unis dans son Église.