3ème dimanche de Carême - Année A
Par P. Vianney le dimanche 27 mars 2011, 17:00 - Homélies - Lien permanent
« Va, appelle ton mari, et reviens »
Lectures du jour :
Première lecture : Ex 17,3-7 ;
Psaume 94,1-2.6-7ab.7d-8a.9 ;
Deuxième lecture : Rm 5,1-2.5-8 ;
Évangile : Jn 4,5-42.
Homélie :
« Va, appelle ton mari, et reviens ».
À ma connaissance, dans tout l’Évangile, c’est la seule fois où Jésus demande à une femme de lui amener son mari. Et, malchance ! c’est justement à cette femme qu’il le demande. Pourquoi ?
Eh bien, il semble que ce soit sa manière de répondre à la demande de cette femme : « Seigneur, donne-la moi, cette eau : que je n’aie plus soif ! »
Reprenons, voulez-vous, ce si beau dialogue entre Jésus et la Samaritaine…
Tout commence par une promesse de Jésus : « celui qui boira de l’eau que moi je lui donnerai n’aura plus jamais soif ; et l’eau que je lui donnerai deviendra en lui source jaillissante pour la vie éternelle ».
Face à cette promesse, la Samaritaine, qui a un certain sens pratique, prend Jésus au mot ! « Donne-la moi, cette eau, que je n’aie plus soif, et que je n’aie plus à venir ici pour puiser ».
Oh, nous aussi, nous fonctionnons comme cela avec le Bon Dieu, tout comme le peuple d’Israël au désert, avec Moïse : quand les choses ne vont pas, nous nous tournons vers Dieu et nous lui demandons de régler le problème. Allons bon ! Voilà que je n’ai plus d’eau au robinet ! Premier réflexe : « Seigneur ! J’en ai marre ! Tout va de travers depuis ce matin ! Fais quelque chose ! » Je me retrouve au chômage, ce qui est un problème autrement vital : « Seigneur ! Il faut que je nourrisse ma famille ! Fais quelque chose ! »
Je crois que nous avons raison de faire cela : évidemment, le plus souvent, le Seigneur ne nous enverra pas, apparemment, un Moïse qui va nous rétablir l’eau courante ou nous redonner un emploi, simplement par un coup de bâton bien placé. Mais, ce qui est peut-être important, c’est que, dans ce manque soudain, nous nous tournons vers lui… et il n’attend que cela !
Mais il répond parfois d’une manière étonnante…
« Va, appelle ton mari, et reviens »… Avec la Samaritaine, Jésus n’y va pas par quatre chemins. Il veut aller bien plus profond.
Évidemment, elle a besoin d’eau ! Jésus lui montre qu’elle a besoin de bien plus, et, pour cela, il vient mettre le doigt précisément à l’endroit où ça fait le plus mal. Et je n’ai pas beaucoup de peine à imaginer le cœur de cette femme, qui, à ce moment-là, doit se briser. Jusque là, elle tenait tête à Jésus. Maintenant, elle répond simplement : « Je n’ai pas de mari ». Peut-être espère-t-elle que cela va suffire ?
Jésus reprend : « Tu as raison de dire que tu n’as pas de mari, car tu en as eu cinq : là, tu dis vrai ».
Et toi ? N’y a-t-il pas, à certains moments, dans ton cœur, une petite voix qui te dit : « ce que tu as fait là, ce n’est pas bien… combien de temps vas-tu rester dans cette situation ? » et ton cœur se brise… Oh, Seigneur ! Ne pourrais-je pas oublier ? Non. Au contraire, le Seigneur qui parle au fond de ton cœur, par ta conscience, met le doigt où ça fait mal. Il ne veut pas te laisser dans cette situation intenable. Ton cœur, qui s’est endurci pour ne pas mourir de ton mal, il le brise.
Et le plus étonnant, c’est que tu n’en meurs pas si tu te tournes vers Dieu.
C’est ce que fait la Samaritaine : tout à coup, il n’est plus question d’eau : « Où faut-il adorer Dieu ? À Jérusalem ou ici ? » Et puis, à la réponse de Jésus, elle proclame son espérance dans le Messie. Et Jésus : « Moi qui te parle, je le suis ».
Oh ! Comme nous aimerions entendre cette douce réponse : « Tu crèves de soif, tu crèves de ces blessures que tu t’es infligées toi-même en agissant mal ; c’est moi, me voici, je viens te guérir »
La Samaritaine lâche tout : elle court à la ville, laissant là sa cruche inutile, et que dit-elle ? « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Messie ? »
De son cœur brisé, au contact de l’amour brûlant et exigeant du Messie, se met à couler une source d’eau jaillissante en vie éternelle, pour elle et pour ceux qui l’entourent. C’est ce que dit saint Paul : « l’amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit Saint qui nous a été donné » !
Recherche d’une eau matérielle pour étancher, pour quelques instants, une soif matérielle.
Contact avec l’amour de Dieu, découverte d’un mal bien plus profond, cœur brisé.
Jaillissement de vie éternelle, et jaillissement contagieux.
Et moi ? Aujourd’hui, dans ma vie ? Quelle part de ténèbres dans mon cœur le Seigneur veut-il me révéler pour m’en libérer ? Me laisserai-je briser le cœur ?
Approchons-nous de l’autel, où le cœur brisé du Christ, laissant couler le sang et l’eau, étanche notre soif et nous donne d’être, à notre tour, source d’eau jaillissante pour la vie éternelle.
Commentaires
Oui... je crois qu'on peut dire que cette homélie n'est pas la meilleure que j'ai dite... On est d'accord.
Et pourquoi on peut le dire ? A quoi ça tient ?
Bien sûr, il y a des critères d'analyse et d'appréciation.
Mais quand la parole Parole est dite, va donc mesurer quels coeurs elle a touchés !
"Et la Samaritaine oublia son eau et sa cruche pour la douceur des paroles de Dieu "
Jn +
La Source peut jaillir.
M-Th
Eh, oh, il va se calmer, hein. Et arrêter de dire des âneries. D'habitude, c'est moi qui ai cette attitude-là... Tu devrais écouter "le psy vous réveille" sur RND le matin, ça fait du bien
Bref, tout ça pour dire qu'elle est très bien ton homélie, j'ai beaucoup aimé parce que prenant un chemin radicalement différent de ce que j'ai entendu dimanche. Un chemin d'humilité, un bon chemin de carême, de celui qui fouille dans les choses dont on n'est pas forcément fier, mais que le Seigneur peut nous aider à assainir, vivifier, transformer.
Et puis zut, c'est pas évident à dire, tu vois ? L'impression de raconter des platitudes alors que tu cherches à nous élever... Alors on va faire un deal : on te met des commentaires, même si on les juge d'une banalité affligeante, et toi tu arrêtes de dire porte nawak sur tes homélies, d'accord ?
@Tigreek : eh, oh, j'dis c'que j'veux ici, d'abord, c'est-y mon blog ou c'est-y pas mon blog ?
Bon... Je ne vais pas m'attarder sur les raisons de mon premier commentaire, elles sont nombreuses et certaines ne sont sans doute pas complètement infondées. En tous cas, une chose est sûre : je ne juge pas une homélie, dite, seulement en fonction des commentaires sur une homélie écrite... mais je dois aussi dire honnêtement et humblement que, c'est vrai, les réactions ici - ou leur absence - ne me sont pas totalement indifférentes.
Roh làlàlà, c'est qu'il est en manque de commentaires le Vianney ! Allez, je suis le deal de Tigreek moi
@Vianney : oui oui c'est ton blog
Par ailleurs, tu as dit toi-même que tu lisais tes homélies, on peut donc penser que tes auditeurs ont entendu ce que nous pouvons lire ici... Certes il manque le ton et le langage "non-verbal" comme disent les communiquants. Mais ça donne une bonne base quand même.
Et oui, tu as probablement fait des homélies plus prenantes. Mais tous les textes ne parlent pas de la même façon...
@Zabou : un bon deal de carême non ?
@Zabou : si je veux apparaître sur une certaine cartographie, c'est sûr que je suis en manque... mais en fait non, ce n'est pas cela qui compte
@Tigreek : en fait, depuis quelques dimanches, j'essaie de ne plus lire mes homélies. Je n'ai plus le texte sous les yeux, juste une petite fiche avec quelques mots-clés et le plan. J'y gagne nettement en "vie" et en échange avec ceux à qui je parle... la différence entre un discours et une homélie, en somme. Ça incite aussi à être simple, à aborder les choses clairement, en disant où on va et comment on y va : si tu perds le fil, toi qui parles, tu peux être sûr que ceux qui t'écoutent sont largués depuis longtemps.
Étais-je fatigué ? Oui. M'étais-je mal préparé ? Certainement. Toujours est-il que cette homélie n'a pas dû être suivie par grand monde, et je trouve ça dommage. Enfin... il y a d'autres raisons, que je n'aborderai pas ici
Via,
Preuve de l'efficience de ta rhétorique, je vais moi aussi en venir à "dealer", ou tout du moins à commenter...
Aux grands maux/mots les grands remèdes !
Pour ce qui est du guidage par mots-clés, j'encourage cette initiative. C'est ainsi que je procède dans des cas similaires (toutes proportions gardées).
Sur le n° 7 : ça, c'est une bonne nouvelle : que tu ne lises plus tes homélies...
c'est bon pour la communication, ça ne diminue en rien le travail de préparation,
ça ouvre la porte au vent de l'Esprit )