Lectures du jour :

Première lecture : Jl 2,12-18 ;
Psaume 50,3-4.5-6ab.12-13.14.17 ;
Deuxième lecture : 2 Co 5,20-21.6, 1-2 ;
Évangile : Mt 6,1-6.16-18.

Je n'ai pas d'homélie à faire à la paroisse pour ce jour d'entrée en Carême... mais une communauté expat', en un pays lointain, demande à mon cher curé une homélie pour ce jour, et voilà-t-y pas qu'il me dit, mon curé : "Oh, moi je n'écris jamais mes homélies, mais toi si !" Oui, j'écris mes homélies... quand je dois prêcher :)
Voici donc ma première homélie sans prédication, après, dimanche dernier, ma première prédication sans écrit ! Que de nouveautés, mon Dieu, sur ce blog !!!! :D

Homélie :

« Parole du Seigneur : "Revenez à moi de tout votre cœur, dans le jeûne, les larmes et le deuil !" »
Aujourd’hui, le Seigneur nous appelle à revenir à lui en nous rappelant ce que nous sommes : des êtres créés, des êtres pécheurs, des êtres mortels. Mais c’est un Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, renonçant au châtiment qui nous y invite, aussi pouvons-nous nous tourner vers lui en toute confiance.

Le jeûne. Nous sommes des êtres créés, le Seigneur a modelé Adam avec de la terre, comme nous le rappelle cette phrase que l’on peut dire au moment de l’imposition des cendres : "Souviens-toi que tu es poussière, et que tu retourneras en poussière".
Dans un monde qui nous pousse à un double mensonge, le Seigneur nous appelle à refaire la vérité sur nous-mêmes. Quel double mensonge ? Eh bien, d’une part, celui de croire que nous nous suffisons à nous-mêmes, que nous n’avons besoin de personne pour exister, pour subsister. D’autre part, celui de croire que nous pouvons tout avoir, que tout est consommable, que rien ne peut nous manquer et que c’est bien ainsi.
Face à cela, le jeûne est un moyen de reconnaître cette simple vérité : si je ne mange pas du tout, je meurs, je ne me suffis pas à moi-même ; mais, si je mange simplement ce dont j’ai besoin, je ne meurs pas, et je n’ai pas besoin de plus.
Peut-être puis-je, à l’occasion de ce Carême, pointer une chose que je consomme trop et y renoncer ?

Les larmes. Nous sommes des êtres pécheurs, Adam s’est détourné de celui qui lui donnait la vie, et c’est, depuis lors, le lot quotidien de l’humanité. Et il s’agit maintenant de se retourner vers le Seigneur, comme nous y invite cette autre phrase que l’on peut dire au moment de l’imposition des cendres : "Convertissez-vous et croyez à l’Évangile".
Dans un monde qui nous pousse à un double mensonge, le Seigneur nous appelle à faire la vérité sur nous-mêmes. Quel double mensonge ? Eh bien, d’une part, que le mal n’existe pas, que ce n’est qu’une vision de l’esprit ou de notre subconscient, qu’il suffit de le décider pour qu’il n’existe plus. D’autre part, que ce mal est invincible et que nous sommes déjà perdus, alors à quoi bon se battre ?
Face à cela, les larmes et la prière sont un moyen de reconnaître cette simple vérité : je suis réellement pécheur, j’ai réellement fait le mal, j’ai réellement mal agi contre Dieu et contre mon prochain ; et le mal est déjà vaincu par la Passion, la Croix et la résurrection de notre Sauveur, Jésus-Christ. Les larmes prennent alors un tout autre goût : celui de la joie du pécheur pardonné et aimé infiniment. Larmes de peine d’avoir fait de la peine à ce Dieu tendre et miséricordieux, larmes de joie d’être aimé par ce Dieu lent à la colère et plein d’amour.
Peut-être puis-je, à l’occasion de ce Carême, prendre la décision de prier, chaque jour, fidèlement, quelques minutes peut-être ? mais prier, me laisser aimer par le Bon Dieu et le laisser m’apprendre à l’aimer à mon tour ?

Le deuil. Nous sommes des êtres mortels. Et le Seigneur a pris notre condition d’hommes mortels pour nous redonner sa vie.
La mort, c’est la séparation violente et douloureuse de l’âme et du corps, et le deuil est la réalisation et la manifestation concrète de cela : nous ne sommes pas faits pour mourir, c’est le péché qui est la cause de la mort. Et qu’est-ce que le péché, sinon l’attachement à autre chose qu’à Dieu seul ?
L’aumône est une forme de deuil qui est la suite toute naturelle du jeûne : tous deux nous aident à nous détacher de tout ce qui n’est pas Dieu, de tout ce qui n’est pas indispensable à notre vie ici-bas et au Ciel. Mais, quand le jeûne peut nous laisser encore centrés sur nous-mêmes, l’aumône nous pousse à sortir de nous-mêmes pour nous tourner vers notre prochain, pour lui donner ce dont il a réellement besoin et pour nous donner nous-mêmes. C’est ce que le Seigneur a fait en prenant sur lui notre péché : il nous a donné ce dont nous avions réellement besoin, et il s’est donné lui-même pour nous sauver.
Peut-être puis-je, à l’occasion de ce Carême, ouvrir mon cœur à ce don que le Seigneur me fait, et ouvrir mon cœur à ce don que le Seigneur me propose de faire, avec lui, à mon frère qui est dans le besoin ?

Frères et sœurs dans le Christ, que Dieu tout-puissant vous bénisse, qu’il vous donne la joie et la paix. Que ce Carême soit pour chacun de vous un temps de vérité et de joie : vous êtes sauvés, accueillez ce salut et portez-le à vos proches !