La neige, tombée en masse le jour de l'Immaculée Conception, recouvrant d'une belle blanche couche immaculée toute la région... provoquant aussi des embouteillages phénoménaux, et aussi...

... l'entraide, dans la bouillasse glacée et bientôt verglacée, entre les automobilistes énervés, fatigués, parfois effrayés à l'idée de partir en glissade sur la pente très forte qui longe le presbytère, et les passants, les habitants du coin, les gendarmes (pourtant hors de leur juridiction, mais sortis tout de même pour organiser comme ils pouvaient une circulation dangereuse). Le café distribué, la boue prise dans la figure pourtant toujours souriante quand on pousse une voiture qui patine, les conseils donnés et souvent suivis ("Passe la seconde et vas-y, j'te pousse !", et vogue la galère), les sourires sur les visages fatigués de ceux qui marchent depuis déjà plus d'une heure et qui ont encore autant à faire jusqu'à chez eux, et qui reçoivent mes encouragements sur le bord de la route comme si j'étais la Providence, alors que je n'ai que mon sourire à offrir (et que mon col romain est planqué sous un pull, une écharpe et un blouson, d'ailleurs).
Ou ces gamins qui viennent à l'instant de m'aider à pousser ma voiture pour la remettre à un endroit où je puisse rejoindre la route : "Tu te rappelles, la dame qu'on a aidée hier, elle ne nous avait même pas remerciés, et pourtant on l'avait aidée sans qu'elle nous le demande !"... et leur sourire joyeux à l'idée d'avoir aidé et d'en être simplement remerciés (et leur sourire interrogatif quand j'ouvre mon blouson pour révéler mon col romain).

... les rencontres avec les auto-stoppeurs pris au hasard des routes enneigées, attendant parfois depuis plus d'une heure qu'une bonne âme accepte de les prendre. Notamment Yohann, véritable bonhomme de neige frigorifié enfermé dans ma voiture avec moi pendant plus d'une heure pour quelques petits kilomètres de discussion chaleureuse. Yohann, père de famille, athée non baptisé et "très ouvert", qui en oublie de descendre de ma voiture à l'arrêt prévu, parce qu'il m'a demandé de lui raconter ma vocation et qu'il est émerveillé quand je lui raconte que je vais prier avec des enfants adorateurs. "Vous devez en avoir de moins en moins, non ?... Ça doit être super beau..." et très touché quand je lui demande son prénom et lui dis qu'on priera pour lui.

L'accompagnement d'un couple demandant le baptême pour leur petit bout de quelques semaines, qui arrivent en demandant la protection de Dieu pour leur enfant, elle croyante mais n'ayant pas "fait sa confirmation" et n'allant pas beaucoup à l'église, lui se rappelant toutefois qu'il est baptisé, mais depuis, rien. Une heure plus tard, l'émerveillement et le sourire un rien inquiet du même Papa découvrant l'amour du Père, et du Fils qui prend cette nature humaine blessée par le péché depuis l'origine pour enfin accomplir cette Alliance entre Dieu et l'homme, alliance tant de fois préfigurée par tant d'alliances détruites par le péché des hommes. "Ah, je n'avais jamais pensé que c'était tout ça, le baptême ! C'est beaucoup, beaucoup plus... comment dire ?... profond que ce que je croyais !"
Et l'absence de réaction négative quand je leur propose, à l'occasion du baptême de leur fils, de se reposer la question de la réponse à l'Alliance scellée à leur baptême entre eux et le Bon Dieu. Plutôt un silence songeur... Et si ?...

La petite bouille au nez rouge et aux yeux rieurs soudain sérieux de... appelons-la Julie, voulez-vous ? de Julie, 8 ans, qui, au catéchisme mercredi matin, me dit tout à coup, en plein milieu d'un Je vous salue Marie pour le 8 décembre : "Mais... mais... Dieu, il ne peut pas avoir de mère !!! Pourquoi on dit Mère de Dieu, alors ?" Et les neurones qui tournent à 200 à l'heure devant cette formule tellement mystérieuse : "Jésus n'a pas de mère divine, et il n'a pas de père humain, mais il a une mère humaine et un Père divin !", tandis que... appelons-le Raphaël, voulez-vous ? Raphaël, à côté, retourne la question : "Mais... mais... Dieu, il faut bien quand même qu'il ait un père, sinon il ne pourrait pas exister !" Et les neurones qui tournent à... comme ils peuvent, les neurones de Raphaël, pour essayer d'imaginer qu'on ne peut pas imaginer de début à l'existence de Dieu, puisque c'est lui qui donne l'existence à tout, à absolument tout, même à lui, et cela depuis... toujours !
Bon, et si on chantait Comme les rois mages, leur tube de l'Avent ? Une prière peu académique, peut-être, tous à genoux à côté de moi devant mon immense cheminée où trône une grande croix entourée de deux bougies, sources de tant de fierté quand on réussit à allumer l'allumette qui les enflammera avant la prière du début et la prière de la fin de l'heure de caté...

La barbe drue et les yeux pétillants de mon nouveau père spirituel, et ses conseils si éclairants... mais ça, je n'en dirai pas plus.

La prière, difficile, laborieuse, matinale (et ça, j'vous jure, c'est un cadeau tellement ce n'en est pas un, merci mon père spi : on peut dire qu'il commence fort !), mais à nouveau retrouvée, et qui fait mal tellement elle fait du bien, tellement j'en ai besoin, tellement j'en ai eu besoin sans réussir à la trouver pendant un mois.

Et tant d'autres joies, et la joie d'être aimé de Dieu, la joie même des difficultés quotidiennes, la joie d'avoir été choisi et de choisir encore, chaque jour, cette joie pas si simple mais si belle... Merci Seigneur ! Merci à tous pour votre prière, votre amitié, vos petits mots discrets, vos textos clignotant dans la nuit... Joie !

Grazie mille, milles grâces, comme disent si joliment nos voisins outre-alpins !